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De Pace Fidei du cusain est publié en 1453, année même de la prise de Constantinople par les Turcs. S'étant rendu à la Diète de Ratisbonne porteur d'un document du Pontife le chargeant d'organiser les préparatifs militaires en vue de répondre à l'assaut des Infidèles, Nicolas de Cues ne croit pas au pouvoir des armes. Dans la paix de la Foi , il cherche à faire du monde un vaste forum de discussions sur la pluralité des rites religieux. Le but étant de trouver le fondement, le lien qui unirait chacune des différences théologiques dans une sorte de religion universelle dans laquelle la divergence de pratique serait acceptée. Le respect mutuel serait le nouveau credo pour s'affranchir des velléités de dominer l'autre pour lui imposer sa croyance. On peut déjà voir en Nicolas de Cues le précurseur de la Paix Perpétuelle dont le thème reviendra sous la plume de Kant en 1795.
Pour lui tout se détermine dans l'idée sous-jacente d'un présupposé qui permettrait l'accord ; et selon lui le Christ est la référence religieuse car il est le médiateur entre Dieu et les hommes. La foi revient à se fondre sur l'unité christique dans des rites, des cérémonies toutes différentes selon que l'on se place du côté de telle ou telle communauté. Comme le dit fort bien le cusain : " Avant toute pluralité, on trouve l'unité."
Il s'intéressera même au Coran dont il recommandera la lecture à son ami Jean de Ségovie.
Cette ambition de réconciliation universelle religieuse est une formidable ouverture sur les divergences et un grand acte de tolérance. Faire tomber les armes afin de s'employer dans la liberté des mots au grand dessein d'union est une originalité très puissante qui fait de Nicolas de Cues le premier grand penseur de la Renaissance. Il marque encore notre temps de son empreinte, dans notre monde actuel qui connaît toujours les sempiternelles divisions, les déchirures les plus inhumaines dans l'arène cruelle où les religions se font face avec une adversité toujours mêlée de certitudes et d'intolérances.
Cues est un modèle de pureté et de prévenance, délaissant tout désir de puissance ou de pouvoir afin de se pencher sur les malheurs d'une chrétienté qui souffre dans l'égarement.
Jusqu à sa mort, il se donnera à la réforme de l'Eglise. Lorsque son ami Aeneas Sylvius Piccolomini accède au trône de Saint-Pierre sous le nom de Pie II en 1458, Nicolas est appelé à Rome où il deviendra vicaire temporel des Etats pontificaux. Il trouvera les ressources morales pour effectuer au mieux son dernier travail malgré les douleurs lancinantes dont son corps est l'épouvantable théâtre. Pris d'un excès de fièvre ; il rendra son dernier souffle le 11 août 1464 à Todi.
Nicolas de Cues ne doit cependant pas s'effacer de nos mémoires mais devenir un support spirituel nécessaire pour affronter les souffrances du monde comme il l'a été de son vivant pour une Eglise écartée de son chemin évangélique.
Repères bibliographiques :
Pour découvrir Nicolas de Cues il faut s'imprégner de sa pensée souvent difficile dans le magnifique roman de Jean Bédart intitulé
Nicolas de Cues aux Editions de l'Hexagone.
Un site qu'il faut en priorité visiter est celui dédié à notre personnage par Jean-Marie Nicolle.
Son adresse est la suivante :
http://perso.wanadoo.fr/jm.nicolle/cusa/ .
Pour ceux qui voudraient entrer dans les méandres philosophiques cusaines tout en restant dans l'abordable un ouvrage synthétique fait référence, il s'agit de l'ouvrage intitulé
Nicolas de Cues de Maurice de Gandillac aux Editions Ellipses.